Figurez-vous... que l’articulation des parcours professionnels et familiaux des femmes, avant leur 50 ans, est associée à leur chance de vieillir en bonne santé

Figure Beaufils_Mars 2023

Odd-ratios de la probabilité de mauvaise santé perçue des femmes de 50 ans ou plus, selon les 10 classes représentant leur histoire familiale et leur carrière (entre 18 et 50 ans) (intervalles de confiance à 90%)

Note: Les femmes de 50 ans et plus sont réparties en 10 classes issues d'une analyse de séquences, selon les caractéristiques marquantes de leur parcours familial et professionnel ; l'indicateur de santé perçue est comparé à celui de la classe de référence (carrières continues à temps plein, 1er enfant après l'âge médian) dans un modèle de régression logistique, ajusté sur l'âge, la situation conjugale en 2010, le niveau de diplôme, l'origine sociale, la qualification au premier emploi, la nationalité à la naissance, la santé passée.
Source: Enquête Santé et itinéraire professionnel, 2010
Lecture: Les femmes âgées de 50 ans ou plus en 2010, qui ont eu un enfant autour de l'âge médian et une carrière continue à temps plein (entre leur 18 et 50 ans) ont une probabilité de mauvaise santé perçue significativement plus élevée que celle de la classe de référence (avec un intervalle de confiance à 90%).

Constance BEAUFILS, socio-démographe, étudie les liens entre les parcours de vie et la santé aux grands âges. Elle combine des approches quantitatives et qualitatives.

L’enquête “Santé et Itinéraire Professionnel” (2006-2010), lui permet de construire une typologie répartissant les femmes (50 ans et plus) en dix classes croisant trois “carrières-types” (continue-temps plein ; passage à temps partiel ou interruptions ; sortie définitive) et cinq “familles-types” (premier enfant à l’âge médian -24 ans- ; avant cet âge ; après cet âge ; mères sans conjoint ; sans enfant). Plusieurs indicateurs de bien-être, ici la santé perçue, sont mobilisés. Trente entretiens, conduits auprès de femmes ayant interrompu leur carrière, complètent les analyses.

Elle montre que les femmes au-delà de 50 ans sont en meilleure santé lorsqu'elles ont eu une carrière continue à temps plein, qu'elles aient eu un premier enfant avant ou après l’âge médian, y compris en ayant vécu sans conjoint, ou qu’elles n’aient pas eu d’enfant.

Celles qui ont eu un premier enfant vers l’âge médian, en restant en emploi (temps plein ou partiel), sont en moins bonne santé ; leurs scores d’anxiété et d’absence de soutien sont plus élevés, suggérant des difficultés d’articulation des vies familiale et professionnelle, à un moment charnière de la carrière. Les interruptions ou sorties définitives sont aussi associées à une mauvaise santé ; les entretiens décrivent un déclassement professionnel, anticipé ou vécu, des difficultés financières, surtout en cas de séparation ou de difficulté d’emploi du conjoint, et une stigmatisation sociale.

Dans le contexte français, les histoires familiales des femmes ne semblent pas associées à une moins bonne santé quand leur carrière est continue à temps plein ; c’est cependant le cas avec un premier enfant vers l’âge médian ou des trajectoires distantes de l’emploi, probablement en raison de difficultés financières ou organisationnelles, qu’il faudrait davantage étudier.

 

Post-doctorante à l'Ined, projet GINCO

Références : `

Constance Beaufils, 2022, "L'inactivité professionnelle au cours du parcours de vie : un déterminant social de la santé des femmes aux âges élevés ?". Institut National d'Etudes Démographiques - Aubervilliers : Université Paris Saclay. http://hdl.handle.net/20.500.12204/AYWHkxnLLg0aT10RubGZ

Beaufils, C., Barbuscia, A., & Cambois, E. (2023). Women’s Employment–Family Trajectories and Well-Being in Later Life: Evidence From France. Journal of Aging and Health, 0(0). https://doi.org/10.1177/08982643221147637