Les figures du mois

La figure du mois présente un résultat clé issue d’une recherche, possiblement publiée, d’un.e doctorant.e, post-doctorant.e du champ, sous un format journalistique avec une figure ou illustration ainsi qu’une présentation en 300 mots.

FIGUREZ VOUS… qu’augmenter le recours à l’aide professionnelle pour les personnes âgées, ne soulage pas nécessairement les aidants informels.

Figurezvous_ElsaPerdrix_mars2024

Elsa PERDRIX, économiste, s'intéresse à l'articulation des aides formelles (professionnelles) et informelles (des proches) mobilisées par les personnes âgées en difficulté dans les activités de la vie quotidienne. L’aide informelle, plus fréquemment mobilisée, peut affecter la qualité de vie des aidé·es, en créant une situation de dépendance vis-à-vis d'un proche. Elle affecte également la santé des aidant·es, leur insertion sur le marché du travail et leur vie sociale. Ici, Elsa PEDRIX analyse, avec Quitterie ROQUEBERT, comment la modification de l'aide professionnelle affecte le recours à l’aide informelle.

La variation territoriale des prix de l’aide professionnelle est une source exogène de variation du recours à cette aide. Sur cette base, et à partir des données de l’enquête CARE 2015, l’effet causal de l’aide professionnelle sur l’aide informelle est estimé dans des modèles de régressions non linéaires, instrumentés par cette variation de prix. Ces estimations montrent que le recours à l'aide professionnelle ne s'accompagne que d'une diminution marginale de l’aide apportée par les proches : il faut atteindre 11 heures hebdomadaires supplémentaires d'aide formelle pour abaisser significativement la probabilité de recours à l’aide informelle de 2.6 points de pourcentage. Si l'effet est plus marqué pour les aidantes que pour les aidants, le recours accru à l’aide formelle ne change ni le soutien moral, ni l'aide matérielle reçus des proches. L'aide formelle n'a pas d'effet spécifique sur l'aide principale ou secondaire, sur celle apportée par les conjoint·es ou les enfants. Nous n’observons pas non plus d’effet significatif de l’aide formelle sur la quantité d'aide informelle reçue.

Augmenter l’aide professionnelle a donc un effet très limité sur l’aide informelle total. Les politiques d’amélioration de l’accès à l’aide professionnelle, bien qu’efficace, ne permettent pas à ce stade de limiter l'implication des proches.

Maîtresse de conférences en économie
PSL-Université Paris Dauphine, LEDa-LEGOS

Perdrix, E., et Quitterie Roquebert. 2022. Does the amount of formal care affect informal care? Evidence among over-60s in France ». The European Journal of Health Economics 23,3 : 453‑65. https://doi.org/10.1007/s10198-021-01370-5.

Ben Jelloul, M., Bozio, A., Perdrix, E., Rain, A. & Toulemon, L. 2023. Dynamic of the Disablement Process in Ageing Populations. Economie et Statistique / Economics and Statistics, 538, 13–30. doi: 10.24187/ecostat.2023.538.2090

FIGUREZ-VOUS...que la réforme italienne, repoussant l'âge de départ en retraite de 4 ans, a conduit des femmes à opter pour un départ anticipé en dépit de la pénalité financière subie

Figure du mois de février 2024

Répartition de l'âge de départ des femmes retraitées ayant cotisé 35 ans, concernées ou non par la réforme (nées en 1952 et en 1951)

Source : Données administratives de l'INPS, échantillon de femmes retraitées  nées en 1951 ou 1952 (observations entre 2008 et 2020).

Elena BASSOLI, économiste, s'est intéressée aux comportements de départ à la retraite en analysant les effets d'une réforme italienne majeure (Monti-Fornero, 2012) : en conservant le nombre minimum d'années de cotisation à 20 ans, elle a repoussé de 60 à 64 ans l'âge minimal pour percevoir une pension complète, à compter de la génération 1952. Avec Ylenia BRILLI, Elena BASSOLI a examiné l'effet de cette réforme pour les femmes, qui sont particulièrement exposées à des difficultés financières durant la retraite.

Le chiffrage de l'effet de la réforme s'appuie sur le dispositif de départ anticipé proposé aux Italiennes : un âge de départ minimal de 57 ans, dès 35 années de cotisation, avec un calcul de pension spécifique. La réforme n'a pas changé cet âge, mais au prix d'une baisse allant jusqu’à 30% de la pension complète. Cette pénalité a-t-elle incité les femmes à travailler jusqu'à 64 ans ? L'étude répond à cette question par une analyse de différence en discontinuité, comparant l'âge auquel les femmes ayant cotisé 35 ans partent à la retraite selon qu'elles sont nées en 1951 ou 1952. La base de données des retraitées montre qu'entre 2011 et 2020, les départs sont massivement concentrés entre 61 et 62 ans dans la cohorte de 1951 alors que la distribution devient très étalée dans la cohorte de 1952. Pour autant, 47.22% de ces dernières sont parties avant 64 ans et l'âge moyen de départ a diminué de 61 ans et 7 mois à 60 ans et 11 mois. La réforme a poussé nombre de femmes à opter pour une sortie précoce, au prix d'une pénalité financière estimée à 15% de leur pension par rapport à la génération non concernée.

Des réformes graduelles auraient probablement évité un si grand recours à cette modalité de sortie monétairement pénalisante.

Elena BASSOLI

Post-doctorante Paris School of Economics

Références :

  • Bassoli E, Brilli Y, (2024) “Working longer or opting out? Women’s costly response to a recent pension reform”, working paper
  • Bassoli E., Bonsang E., Brugiavini A., Pasini G., (2022) ``End-of-Life Care and Depression'' Applied Economics Letters DOI: hIps://doi.org/10.1080/13504851.2022.2099516
  • Bassoli E., Belloni M., Brugiavini A., Gao Y., ``Did the pandemic change retirement trends?" (2023) In ``Social, health, and economic impacts of the COVID-19 pandemic and the epidemiological control measures", De Gruyter

FIGUREZ-VOUS...qu’une mesure clinique auprès d’un groupe de travailleurs immigrés retraités, vivant en résidences sociales en France, témoigne d’une fragilité physique chez plus de la moitié d’entre eux

Figure du mois de janvier 2024

Champ : 67 anciens travailleurs immigrés vivant France en résidences sociales plus de 6 mois dans l’année suivis par l’association Banlieues Santé . 2021

Leila BETTAYEB, anthropologue, s’intéresse à la santé de Chibanis (en dialecte arabe « Cheveux gris »), retraités immigrés (majoritairement du Maghreb) qui ont travaillé en France et vivent en résidence sociale dans les quartiers Nord de Marseille. Elle travaille sur leurs besoins de santé, quand la littérature suggère des problématiques d’accès aux soins pour eux. Son approche monographique s’appuie sur des questionnaires et des mesures fournissant des données socio-démographiques, médicales, anthropométriques et cliniques. En 2021, ce travail a inclus 67 hommes volontaires (âgés de 73 à 82 ans) suivis par l’association nationale « Banlieues Santé ».

Les résultats descriptifs montrent un score moyen de force de préhension de 26 Kg, inférieur au seuil normal (27 kg) ; plus de la moitié de ces retraités est sous ce seuil. Précisément, 21 des 37 anciens ouvriers du bâtiment et 6 des 8 anciens agents d’entretien ont une force de préhension en dessous de la norme vs 10 des 22 retraités des autres métiers. Ainsi, c’est parmi ceux ayant exercé des métiers manuels que la force musculaire est la plus faible.

La question d’une atteinte musculaire plus globale, la sarcopénie (baisse de masse et force musculaires), reste posée à ce stade. D’autres critères de santé dégradée présents dans les données seront examinés (dénutrition, polypathologie, polymédication). Les situations à la croisée de ces indicateurs témoignent en effet de vulnérabilités sociales et de santé : il s’agira ainsi de comprendre comment la combinaison du dernier métier occupé et de facteurs socioéconomiques (ressources, logement, alimentation, relatif isolement) contribue à ces fragilités, afin de mieux identifier les besoins en termes d’accès et de recours aux soins.

 

 

Doctorante unité ADES UMR 7268 d’Aix Marseille Université

Références :

  • Bettayeb L, Chiaroni J, Ennomany Y, Saliba-Serre B, Nouguerède E, Rey D, Villani P, Couderc AL. Identification of Frailty in a Population of Former Immigrant Workers in the South of France. J Nutr Health Aging. 2021;25(10):1226-1228.
  • Bettayeb L, Jaffre Y, Chiaroni J, Ennomany Y, Villani P, Couderc AL. Accès aux soins d’une population d’anciens travailleurs immigrés vivant en foyer. Santé Publique 2023;35 (5) (In Press)

FIGUREZ-VOUS... que l’environnement résidentiel modifie les liens entre problèmes fonctionnels et difficultés à réaliser des activités dans le quartier, différemment selon le type de barrière

© ILVV Figure du mois_Laborde (©macrovector-Freepik)

Caroline LABORDE, socio-épidémiologiste, travaille sur la perte d’autonomie fonctionnelle aux âges élevés. Elle s’est intéressée à la manière dont l’environnement résidentiel des personnes interfère avec leur état fonctionnel lorsqu’on analyse leurs difficultés à réaliser les activités du quotidien.

Caroline LABORDE utilise l’enquête CARE-Ménages, auprès des personnes de 60 ans ou plus vivant à domicile. Elle appréhende l’autonomie fonctionnelle par la réalisation « seul et sans difficulté » de plusieurs activités réalisées à l’extérieur (faire ses courses, prendre les transports…), selon le nombre de limitations fonctionnelles déclarées. Elle a créé des indicateurs de « barrières » environnementales déclarées dans l’enquête (mauvaise qualité des trottoirs, présence d’escaliers pour sortir, manque de bancs) et de faible niveau d’équipements de la commune de résidence via la base de l’Insee (BPE) (notamment, l’offre de commerces alimentaires).

Plus on a de limitations fonctionnelles, moins on réalise ces activités « seul et sans difficulté » ; elle décline ce résultat, par des modèles multivariés, selon les barrières. Dans des environnements caractérisés par des trottoirs de mauvaise qualité ou l’absence de bancs, les personnes réalisent encore ces activités seules, mais plus souvent avec des difficultés (écart croissant avec le nombre de limitations fonctionnelles). Dans ceux caractérisés par des escaliers pour sortir de chez soi et une faible diversité de commerces alimentaires dans la commune, les personnes sont plus souvent aidées (écarts non significatifs lorsque le nombre de limitations est élevé).

Sans pouvoir statuer avec ces données sur un effet causal de l’environnement (lieu de résidence et état fonctionnel pouvant dépendre d’autres facteurs liés), ces résultats témoignent d’associations significatives entre environnement résidentiel et réalisation d’activités extérieures et différentes selon le type de barrières. Ces résultats invitent à analyser si et dans quelles circonstances l’articulation entre caractéristiques individuelles et environnementales peut favoriser le maintien de l’autonomie fonctionnelle.

 

Socio-épidémiologiste à l'ORS Ile-de-France

Références :

  • Laborde C, Ankri J, Cambois E (2022) Environmental barriers matter from the early stages of functional decline among older adults in France. PLOS ONE 17:e0270258. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0270258
  • Laborde C (2023). Analyses des caractéristiques départementales et résidentielles favorisant l’autonomie fonctionnelle des personnes âgées. Thèse de doctorat de l’université Paris-Saclay.

FIGUREZ-VOUS... QU’EN DÉMÊLANT LES EFFETS CAUSAUX, ON MONTRE QUE L’AIDE INFORMELLE REÇUE À DOMICILE NE RETARDE PAS NÉCESSAIREMENT L’ENTRÉE EN INSTITUTION

Figure du mois de novembre

Marianne TENAND, économiste, s’intéresse au rôle de l’aide informelle (apportée par les proches) dans l’accompagnement de la dépendance des personnes âgées. Avec Julien BERGEOT, elle a testé l’hypothèse selon laquelle cette aide prolongerait le maintien au domicile. Car sur cette base, l’idée de stimuler l’aide par les proches est souvent avancée pour réduire les coûts publics d‘un accompagnement en institution. Or, le lien de cause à effet reste à prouver.

Capturer l’effet causal entre aide informelle et maintien à domicile est complexe du fait de l’existence d’autres mécanismes ; notamment, via la mauvaise santé qui s’accompagne de plus d’aide informelle et accélère l’entrée en institution. Les méthodes à « variable instrumentale » permettent de relever ce défi : une telle variable est statistiquement reliée à la cause testée (être aidé), mais son lien avec l’effet (rester au domicile) passe exclusivement par son lien à la cause. Ici, c’est la proportion de filles parmi les enfants de la personne âgée qui est choisie : statistiquement, les filles ont une propension à aider plus élevée que les fils. La méthode est appliquée aux données issues d’un appariement entre une enquête néerlandaise auprès de personnes âgées et des données administratives renseignant sur leurs enfants, l’état fonctionnel, l’aide informelle reçue, les entrées en institution et les dépenses d’accompagnement de la dépendance et de la santé dans les trois ans.

Il ressort de cette étude, sur données néerlandaises, que l’aide informelle reçue, déclarée à l’enquête, réduit les dépenses d’hospitalisation et de soins de suite, mais ne réduit pas clairement la probabilité d’entrer en institution. Au contraire, elle l’accroît en cas de limitations sévères, de même que le recours aux aides professionnelles à domicile. L’option de favoriser l’aide informelle nécessite donc de comparer l’ensemble des bénéfices pour ceux qui la reçoivent et l’apportent, aux coûts qu’elle représente.

 

Marianne Tenand, Chercheuse au CPB Netherlands Bureau for Economic Analysis, et chercheuse associée à Erasmus School of Economics, Université Erasme de Rotterdam (Pays-Bas).

Julien Bergeot,  Enseignant-Chercheur, Ca' Foscari University of Venice

Références :

FIGUREZ-VOUS… QUE LE VIEILLISSEMENT EN BONNE SANTÉ DÉPEND DE LA QUALITÉ DE L’ENVIRONNEMENT, AU DELÁ DES CAPACITÉS INTRINSÈQUES

Figurez-vous_2310_GBESSEMEHLAN

Antoine GBESSEMEHLAN, épidémiologiste, travaille sur le vieillissement en bonne santé. En adoptant le modèle du Healthy Aging de l'Organisation Mondiale de la Santé, il propose d’intégrer l’environnement de vie des personnes dans la mesure de leur Aptitude Fonctionnelle (AF), reflet de la capacité de la personne à continuer à faire ce qui compte pour elle. L’AF tient alors compte de la capacité intrinsèque (CI) des individus et de caractéristiques de leur environnement (facilitateur ou avec "barrières").

Á partir des données d'une cohorte française d’anciens agriculteurs (65 ans et plus), Antoine GBESSEMEHLAN a construit un indicateur de l’AF dans lequel il croise des mesures de CI (cognition, mobilité, psychologie, vitalité…) et de l’environnement (soutien social et professionnel, facilité à se déplacer…) pour créer 4 niveaux d’AF : allant d’une AF très élevée (CI optimale quel que soit l’environnement) à une AF très faible (CI altérée et environnement défavorable). Il mesure ensuite la relation entre l’AF et diverses approches du vieillissement en santé (satisfaction de la vie, santé perçue, dépendance et décès).

Les chances de se percevoir en bonne santé sont accrues par un environnement favorable lorsque la CI est dégradée. A l’inverse, la survenue de dépendance est liée à la CI altérée quel que soit l’environnement (pas de compensation par l’environnement). Le niveau le plus faible d’AF est aussi prédicteur de mortalité et d’insatisfaction de la vie. De plus, des analyses complémentaires ont mis en évidence que, même si la CI est optimale, avoir un environnement défavorable réduit la satisfaction de la vie.

Ces résultats suggèrent que des interventions pour une bonne AF, et donc un vieillissement en bonne santé, dépasse la seule CI de l'individu et nécessite également des actions sur son environnement de vie.


Post-doctorant en épidémiologie
Centre de recherche Bordeaux Population Health INSERM U1219 - Equipe ACTIVE (Aging, Chronic diseases, Technology, Disability, and Environment)

Université de Bordeaux

Références :

  • Gbessemehlan, C. Proust-Lima, L. Letenneur, H. Amieva, K. Pérès. Healthy Aging: How does a multidimensional construct of Functional Ability predict objective and subjective outcomes?. 2023. Travail en cours de publication

FIGUREZ-VOUS... QUE LE VIEILLISSEMENT DANS LES BOURGS RURAUX RÉSULTE AUSSI DE L'ARRIVÉE DE NOMBREUX NOUVEAUX HABITANTS

© ILVV • A Paumelle Figure de septembre 2023

Parmi les individus âgés de 55-59 ans vivant dans un bourg rural au recensement de 2018, 6709 (4%) n'y habitaient pas encore l'année précédente ; 5432 qui y habitaient l'année précédente en sont partis. Le solde migratoire est positif de 1277 individus pour cette tranche d’âges. (Source : MIGCOM RP 2018, Insee).

Anton PAUMELLE, géographe, s’intéresse au vieillissement de la population des bourgs ruraux en France. Il dénombre 877 bourgs définis comme des petites centralités rurales, de 3000 habitants environ qui bénéficient de la présence de commerces et services structurants (collège, maison de santé, etc). Les bourgs ruraux connaissent depuis les années 1990 un vieillissement de leur population, sans équivalent en France et souvent perçu comme le résultat d’un vieillissement sur place et du départ des jeunes. Anton Paumelle interroge les facteurs explicatifs de ce vieillissement.

À partir du traitement la base MIGCOM de l’INSEE, il confirme que le vieillissement découle du départ de jeunes (notamment les 15-19 ans), mais montre qu'il résulte aussi d'arrivées nombreuses et diverses de personnes âgées (un quart des plus de 65 ans ont emménagé il y a moins de 10 ans). Par leur dimension intermédiaire, entre le village et la ville, les bourgs ruraux captent en effet aussi bien les migrations, parfois lointaines, réalisées en début de retraite (entre 55 et 75 ans) que celles de proximité entreprises à des âges plus élevés (plus de 75 ans).

À rebours des représentations, le très fort vieillissement des bourgs ruraux a ainsi à voir avec une forme d’attractivité résidentielle qui les distinguent des autres catégories de communes. Elle s’explique notamment par leur ancrage dans les espaces ruraux, associé à la présence de commerces, d’un maillage associatif dense et d’équipements et de services facilitant le quotidien des personnes qui avancent en âge (ex : logements adaptés, services de santé et d’aide à domicile, etc.). À l'heure où se construisent de nombreux projets de revitalisation de bourgs ruraux en France, et alors que les personnes âgées constituent une ressource sociale et économique pour les territoires, ce phénomène structurel pourrait apparaître comme une source de développement pour ces communes souvent fragilisées.


Doctorant à l’EHESS (ED 286), UMR Géographie-cités,
ATER à l’Université Paris Nanterre

Références :

  • Paumelle, A., 2022, « Vieillissement et attractivité migratoire des bourgs ruraux en France », L’Espace géographique, 51, 22-39.
  • Paumelle, A., 2022, « Bourg », Hypergéo.
  • Paumelle, A., 2021, « Exploring the evolutions of historical very small towns in rural change: A focus on their socio-spatial reconfigurations in Pays de Caux, France (1960-2020) », AGER: Journal of Depopulation and Rural Development Studies, (32), p. 15-38.
  • Paumelle, A., Verdier, V., (à paraître), « Interroger les limites de l’urbanité : entre ville et village », In Brun, J., Burgel, G., Coudroy de Lille, L., Montigny, G., Ozouf Marignier, M.V., (coord.) Marcel Roncayolo : sur les pas d’un géographe singulier. Parenthèses.

Figurez-vous...que les séries télévisées américaines se sont peu à peu éloignées d’une représentation caricaturale des hommes homosexuels vieillissants

 Nom Figurez-vous_2307_VANDENABEELE

Tanguy VANDENABEELE, sociologue, s’est intéressé au vieillissement des hommes homosexuels, notamment à ses représentations sociales, encore peu explorées. Dans cette perspective, il a analysé 10 séries télévisées américaines diffusées entre 1998 et 2020 dans lesquelles apparaissent des personnages principaux homosexuels. Tanguy VANDENABEELE identifie 20 personnages considérés comme « vieux » dont il analyse les caractéristiques en typologie construite en 5 catégories.

Il montre que jusqu’en 2005, ces personnages sont rares, jouant des rôles secondaires peu consistants. Sans âge défini, ils sont riches et vils (« sugar daddies ») ou pauvres et aigris (« retraités de la vie gay »). Généralement moqués, ils existent pour agacer, draguer lourdement ou tenter de corrompre les personnages principaux, plus jeunes. Ces rôles suggèrent un vieillissement triste, solitaire et privé de sexualité.

Il trouve ensuite que ces représentations évoluent progressivement à partir de 2006, avec l’apparition du premier personnage principal homosexuel sexagénaire. Les rôles plus complexes font émerger des catégories diversifiées, caractérisées par les parcours, l'âge et la génération : les « révélations tardives », les « quadras » et les « séniors ». Les séries racontent le vécu de nouveaux héros autonomes et imparfaits, souvent au moment de « crises » ; elles racontent leurs expériences, positives et négatives, alors qu'ils explorent des volontés nouvelles, des désirs enfouis et des sentiments refoulés. Ils ne sont pas privés d’une vie sexuelle, mais elle reste surtout suggérée ; les corps vieillissants sont rarement mis à nus, contrairement aux plus jeunes.

Tanguy VANDENABEELE conclut que depuis 2006, les séries délaissent une vision pathétique et pessimiste du vieillissement des hommes homosexuels, affichant des représentations plus variées et souvent positives. Elles restent toutefois peu transgressives et respectent le cadre social de l’hétéronormativité : la quête des personnages mène souvent à la création ou l’entretien d’un couple monogame.


Tanguy VANDENABEELE

Docteur en sociologie, Université de Lille, CeRIES.
Consultant interne au département du Nord.

Références :

Tanguy, VANDENABEELE, Écrire les pages du milieu de la vie. Vieillissement et transformations du script sexuel, thèse de doctorat en sociologie, Université de Lille, laboratoire CeRIES, soutenue le 12 décembre 2022

Figurez-vous... que les organisations représentant les personnes âgées et les personnes handicapées participent de manière morcelée aux instances consultatives qui les concernent

Marion_SCHEIDER_YILMAZ

Données et réalisation :
Conseils consultatifs : CNCPH, Conseil de l’âge/HCFEA, CRSA GE, CDCA 08, CDCA 10, CDCA 51, CDCA 52, CDCA 54, CDCA 55, CDCA 57, CDCA 67, CDCA 68, CDCA 88.
Les arrêtés de composition exploités sont ceux qui étaient en vigueur sur la période de traitement (2018-2019).

Marion SCHEIDER-YILMAZ, sociologue, s’intéresse à la manière dont les organisations représentant les intérêts des personnes âgées et des personnes handicapées participent au processus de construction des politiques et des actions qui les concernent. Elle analyse pour ce faire les arrêtés de composition d’instances ayant vocation à inclure ces représentants.

Elle a ciblé les 10 Conseils Départementaux de la Citoyenneté et de l’Autonomie (CDCA) du Grand-Est. Ils ont été instaurés par la loi d’Adaptation de la Société au Vieillissement, pour rassembler de manière exclusive les acteurs des champs du vieillissement et du handicap. Pour diversifier les échelles territoriales, elle a également consulté les compositions de la Conférence Régionale de la Santé et de l'Autonomie (CRSA) Grand-Est, du Conseil de l’âge du Haut Conseil de la Famille, de l’Enfance et de l'Âge (HCFEA) et du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH). À partir de ce matériau, elle dresse un portrait de l’espace de participation au sein de ces 13 Conseils.

Sur les 339 organismes qui y siègent, 230 représentent les personnes âgées, les personnes handicapées ou celles atteintes de maladies. Les autres représentent des professionnels et partenaires sociaux, ou des institutions et administrations œuvrant en direction de ces publics. Parmi les 4 organismes présents dans les 13 conseils, seule l’UNAF porte les intérêts des usagers. 81% des organismes recensés ne siègent que dans 2 à 3 conseils dans un même ensemble territorial, soulignant la faible articulation des échelles départementale, régionale et nationale. Parmi les 36 organismes présents dans au moins 10 conseils, seuls 14 défendent en réalité les intérêts des personnes concernées.

Ces résultats révèlent la diversité des représentants et la variabilité de leur présence dans les instances consultatives. Ce paysage particulièrement éclectique des représentants consultés interroge la circulation des informations et l’harmonisation des enjeux portés par ces acteurs.



 

Sociologue, Docteure de l’Université de Lorraine, Post-doctorante au Laboratoire PACTE de l’Université Grenoble Alpes.

Références :

Scheider-Yilmaz, M., Morales La Mura, R., « Société inclusive : Regards sociologiques », Ressource pédagogique en ligne disponible sur Canal U, Université de Lorraine.

Scheider-Yilmaz, M., Citoyenneté engagée et autonomie : le cas de la participation des personnes handicapées et des personnes âgées dans les Conseils Départementaux de la Citoyenneté et de l'Autonomie, Thèse de doctorat en sociologie, Université de Lorraine, 393 p.

Scheider-Yilmaz, M., Morales La Mura, R., (2021), Participation des usagers : du champ des possibles aux modalités réelles de représentation, Pensée plurielle, n°53, pp. 36-52.

Moulaert, T., Scheider, M., Viriot Durandal, JP. (dirs.), 2018, Vieillissement et territoires. Défis démographiques, enjeux démocratiques, Volume II : Adapter les territoires au vieillissement, un enjeu de citoyenneté, Retraite & Société, n°79, 187 p.

Viriot Durandal, JP., Moulaert, T., Scheider, M., Garon, S., Paris, M., 2018, Adaptation des territoires au vieillissement : politiques publiques et formes d’agencement démocratique – Les exemples de la France et du Québec, Retraite & Société, n°79, pp. 17-41.

Scheider, M., Moulaert, T., Viriot Durandal, JP. (dirs.), 2017, Vieillissement et territoires. Défis démographiques, enjeux démocratiques, Volume I : Définir les territoires et les adapter au vieillissement, Retraite & Société, n°76, 171 p.

Viriot Durandal, JP., Scheider, M., 2016, La démarche Villes et communautés amies des aînés. Quand vieillir devient un enjeu international pour les sociétés contemporaines, Vie Sociale, Nouvelle série n°16, pp. 177-195.

 

Figurez-vous... que le non-recours aux prestations sociales destinées aux personnes âgées aidées et à leurs aidant-es relève en partie de freins juridiques

© ILVV Figure du mois. E. Zerillo

Données issues de : (1) M. Ramos-Gorand, Le non-recours à l’APA à domicile vu par les professionnels de terrain, Les dossiers de la Drees: 10, 2016 ; (2) DSS, Rapport d’évaluation de l’allocation journalière du proche aidant, 2022.

Emma ZERILLO, doctorante en droit, s’intéresse à l’accessibilité des droits sociaux à caractère familial. Les personnes âgées, placées au centre de la famille au travers des différentes situations d’aidance, sont l’un de ses sujets de recherche.

Elle entend éclairer les motifs du non-recours d’un certain nombre de couples « aidant-aidé » à des prestations sociales auxquelles ils ont droit. Les études de la DREES* et de la DSS* révèlent l’ampleur du phénomène. Entre 20 % et 28 % de personnes éligibles ne bénéficient pas de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Plus marquant encore, l’évaluation de l’allocation journalière du proche aidant (AJPA), destinée à rémunérer le congé de proche aidant, donne un taux de recours actuel autour de 2,5% par rapport à l’étude d’impact qui avait été réalisée.
 

Face à ce constat, la recherche d’Emma ZERILLO met au jour les déterminants juridiques qui freinent le recours. À partir de travaux parlementaires, d’enquêtes de terrain, d’études statistiques et doctrinales, elle met en exergue quatre facteurs explicatifs. Le premier est la difficulté pour l’aidant-e à s’identifier comme tel. Cette étape est pourtant essentielle dès lors que la qualification juridique « d’aidant » permet l’application du régime juridique correspondant et l’octroi des droits sociaux. Le deuxième facteur concerne la faible lisibilité des dispositifs en raison de la dispersion du régime juridique à travers de multiples sources et de conditions d’accès variables d’un droit à l’autre. Le troisième est lié à la lourdeur des démarches administratives qui englobe la multiplicité des démarches à entreprendre, la nécessité de contacter de nombreux interlocuteurs et des délais de procédure inadaptés. Enfin, la complexité du recours contentieux, réparti entre plusieurs juridictions, constitue le quatrième facteur en cause dans le non-recours.

*DREES : de la recherche des études de l'évaluation et des statistiques / DSS : Direction de la sécurité sociale

 

Doctorante ATER au Centre de Droit Social à la Faculté de Droit et de Science Politique d’Aix-Marseille Université.

Références : `

E. Zerillo, « Accessibilité des droits sociaux à caractères familiaux », Thèse en préparation, Centre de Droit Social, Faculté de Droit et de Science Politique, Aix-Marseille Université.

E. Zerillo, « Accessibilité des droits sociaux à caractères familiaux - les freins à l’accès aux droits des aidants », intervention orale in Séminaire Crisis, Être étudiant et aidant : quels enjeux à l’université ?, Séminaire 2 – « place de l’aidance dans la famille », Aix-en-Provence, 13 mars 2023.