La dématérialisation des services publics et les pratiques et usages numériques des plus âgés

À l’heure de la dématérialisation des démarches quotidiennes, les barrières limitant l’accès aux outils numériques constituent un enjeu social crucial. Les enquêtes et études indiquent une sur-
représentation des personnes âgées parmi les personnes qui en sont éloignées. Pour autant, les travaux pointent la diversité des situations ; ils invitent à démêler ce qui est commun à tous les âges dans cette « fracture » numérique, à savoir le manque de ressources, et ce qui concerne spécifiquement les plus âgés. En effet, alors que l’on constate que seules 3 % des personnes les plus âgées déclarent ne pas avoir les compétences de base requises, il faut s’intéresser aux autres déterminants de l’utilisation ou de l’éloignement des outils numériques.

Quel que soit l’âge, être équipé et utiliser ces outils relèvent aussi en partie de facteurs personnels qu’il faut identifier et comprendre : l’appétence ou le désintérêt relatifs à la finalité de l’outil, la nécessité d’y recourir et la possibilité de déléguer, le sentiment de pouvoir faire ou la crainte de ne pas savoir. Dans ce cadre, les utilisateurs opèrent un arbitrage entre l’effort à consentir pour s’approprier l’outil et le bénéfice qu’ils en retirent. Cet arbitrage est probablement jugé plus favorable aux outils de communication ou de divertissement qu’à ceux destinés à des démarches administratives ; notamment quand l’ergonomie des interfaces n’en favorise pas la prise en main.

Sur ces aspects, la spécificité des utilisateurs les plus âgés est d’abord conjoncturelle : elle repose sur la moindre familiarité des générations anciennes qui composent la population âgée aujourd’hui. Pour elles, le coût d'entrée pour utiliser l’outil est plus important. Mais l’écart de pratiques entre les plus âgés et la population générale se résorbe avec le temps. La spécificité est aussi structurelle : elle est liée aux maladies et troubles plus fréquents avec l’avancée en âge qui amoindrissent les capacités fonctionnelles (sensorielles, cognitives, articulaires) mobilisées par ces outils. Dans tous les cas, les progrès en matière d’ergonomie des outils et d’accompagnement à leur usage sont nécessaires tant pour améliorer les capacités d’usage, que pour les conserver.
Les recherches sur les conditions d’utilisation ou de non-utilisation des outils, selon les caractéristiques des usagers, doivent se développer pour mieux répondre aux besoins.